Patagonie
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L’automne est la meilleure saison pour la photo. En septembre, de l’Alaska au Kamchatka les couleurs et les lumières sont somptueuses. Mais malheureusement, cela ne dure que quelques semaines par an.
Alors que faire ? Partir dans l’hémisphère sud en avril !
C’est ce qui a motivé mon premier voyage en Patagonie en avril dernier. Les couleurs y étaient exactement comme j’attendais. Puis suivant la même logique, cherchant de la neige au mois d’août, j’y suis retourné en plein hiver austral.
Mais, le réchauffement global ayant visiblement des effets imprévisibles quel que soit l’endroit de la planète où l’on se trouve et pas seulement sur les glaces de l’Arctique, la neige n’était pas au rendez vous cette année en Amérique du Sud, à part un ou deux jours durant le voyage.
A la place, de nombreuses tempêtes comme on en connaît pas en Europe. Ces tempêtes sont inhabituelles durant l’hiver austral, mais typique de cette région le reste de l’année.
Comme on n’oublie jamais le froid mordant de l’Arctique, ce qu’on retient de la Patagonie, ce sont avant tout les vents violents.
La Patagonie Chilienne s’étend jusqu’au Détroit de Magellan. Au-delà du Détroit, au sud, c’est la Terre de Feu (qui est une île partagée entre le Chili et l’Argentine) jusqu’au Cap Horn. La capitale régionale de la Patagonie est Punta Arenas, au bord du Détroit de Magellan, c’est là qu’on arrive de Santiago en avion et de là qu’on repart vers le nord et ses montagnes par la route, en 4×4 de préférence.
En remontant vers le nord depuis Punta Arenas sur 400km, la Patagonie donne le spectacle d’immenses plaines avec parfois quelques arbres (d’ailleurs secs la plupart du temps), mais surtout une herbe souvent jaunie et des buissons épars : c’est la Pampa à perte de vue, mais contrairement au Canada ou à la Sibérie, on y trouve de vastes propriétés les « Estancias » sur lesquelles sont élevés principalement des moutons, des vaches et des chevaux. Le long de la route, c’est donc une succession sans fin de fils de fer de clôtures avec ça et là, tous les 50km, une grande ferme. Malgré l’immensité, on a donc moins l’impression d’isolement et d’aventure sauvage qu’en Alaska, Sibérie ou dans le Grand Nord Canadien.
A 400km au nord de Punta Arenas, après avoir passé Puerto Natales qui est une petite ville avec toute l’infrastructure pour se ravitailler en gasoil, en nourriture et trouver des hôtels et restaurants, on entre dans la partie montagneuse, le sud de la Cordillère des Andes. Les sommets sont à 3500m d’altitude avec des parois verticales de plus de 1000m. C’est le fameux massif de Torres del Paine.
Avant d’arriver dans les montagnes, on peut déjà observer le long de la route des troupeaux de Guanacos, sorte de Lama sauvage et des Caracaras, rapaces un peu plus petits qu’un Aigle. Les Guanacos vont et viennent dans la Pampas, sautant par-dessus les clôtures des Estancias. Ils recherchent de la végétation et sont en concurrence des moutons. Les Caracaras, se nourrissent de Lièvres écrasés sur la route, ou bien de jeunes Moutons qu’ils attaquent lors des naissances, ou bien encore de carcasses de Guanacos ou de moutons adultes laissés par le prédateur de la région : le Puma des montagnes. On peut aussi observer des Nandous de Darwin, sortes d’autruches, plutôt habitués des plaines, afin de voir venir les prédateurs. Enfin, on rencontre des Renards Gris ou des Renards Roux, qui suivent les Pumas pour finir leur repas. Et évidemment, dans le ciel, en se rapprochant des zones de montagnes, on aperçoit les immenses Condors qui planent à la recherche de carcasses.
En règle générale et hormis pour les Guanacos, il est difficile d’approcher cette faune. La clé est justement la recherche de carcasses. Les Pumas chassent généralement la nuit ou en fin de nuit, une ou deux heures avant le levé du jour. C’est un Félin, il voit très bien dans l’obscurité. Parfois avec un peu de la chance et beaucoup de persévérance, on peut se trouver au bon endroit au bon moment, lorsque le Puma attaque un Guanaco. L’action est foudroyante et tout au plus, on peut photographier le Puma s’éloignant ensuite tranquillement, son attaque réussie ou pas, car généralement il ne dévore pas sa proie tout de suite. De plus, le Puma est très craintif vis-à-vis des observateurs qu’il a forcément repérés. Il faut donc patrouiller tous les matins en 4×4 sur les routes de montagne, durant les dernières heures de la nuit, en essayant de voir quelque chose à l’aide de projecteurs et en étant très attentif aux cris des Guanacos, très caractéristiques quand ils ont détecté un danger. Une fois le Guanaco capturé et tué, le Puma essaie de dissimuler la carcasse avec de l’herbe et des broussailles puis l’abandonne. Il revient généralement la nuit suivante ou plus tard dans la journée s’il est vraiment affamé. On peut donc aussi, avec beaucoup de chance, trouver en plein jour un Puma qui fini ou vient finir une carcasse et qui dort, repu, à côté.
Donc pour voir des Pumas, il faut trouver des Guanacos, vivants pour suivre une attaque, ou morts pour attendre le retour du Puma.Cette recherche prend beaucoup de temps la journée : marcher en scrutant les collines à la jumelle. Il faut aussi s’aider des Condors car ils patrouillent dans le ciel eux aussi à la recherche de carcasses. Lorsqu’un groupe de Condors vole en cercle, il y a de fortes chances qu’une carcasse de Guanaco soit en dessous. C’est d’ailleurs également une opportunité de photographier des Condors, mais ils ne se laissent pas approcher facilement à moins de 25m. Ce peut être aussi l’occasion d’observer des Renards qui auront suivi le Pumas ou bien repéré le manège des Condors.
Mais attention : en Patagonie le temps change rapidement; la pluie et/ou un vent violent peuvent survenir en quelques instants : il faut alors très vite se mettre à l’abri (on ne tient pas debout lorsque le vent souffle) et protéger tout son matériel. Le comble est que le Puma affectionne particulièrement la tempête pour chasser le Guanaco, car le souffle du vent couvre son approche !
La Patagonie n’est pas un endroit clément pour le Photographe et le Puma est un animal bien furtif et mystérieux, mais pouvoir encore croiser le regard d’un de ces félins aux yeux immenses est une expérience rare qui justifie entièrement l’aventure et surtout montre que l’homme n’a pas totalement réussi à domestiquer cette terre sauvage, même en y apportant des moutons et en y installant des clôtures.